Depuis quelques jours, des images montrant des boites de conserve avec inscription « viande humaine » circulent sur les réseaux sociaux. Ces boîtes à l’aspect vieilli, étiquetées « Viande Humaine – Premier choix » sont présentées comme commercialisées en France en 1923. Pourtant, ces affirmations sont fausses alors que les photos sont en réalité des objets factices.
Étiquette jaunie, typographie d’époque, scène gravée rappelant un sacrifice ancien, tout renvoie à des objets de collections, sortis d’un musée. Pour plusieurs « complotistes », ces images sont la preuve d’un « commerce macabre de l’après-guerre ». Pourtant, Congo Check a pu remonter à son origine alors qu’aucune archive officielle n’a permis d’établir les traces de ces boites de conserve.
Une recherche avec les mots-clés « Frost Atelier », du nom de la société présentée comme fabricant de ces boites de conserve a permis d’établir que celle-ci a vu le jour seulement en 2002, soit près de 80 ans après la supposée période de commercialisation de ces boites qui lui sont imputées.
L’entreprise, de droit danois, est spécialisé en « accessoires de design intérieur et de quincailleries architecturales conjuguant habilement la tradition du design danois et le côté fonctionnel ».
Dans un second temps, une recherche croisée en associant la marque « Frost », une méthode qui a permis de découvrir que ces boites de conserve sont en réalité des « Objets factices », réalisés pour « collection ou décoration de cabinet de curiosités », comme le prouve cette page du site Leboncoin.fr. Congo Check a également consulté des archives en ligne sans trouver de trace d’une entreprise portant le nom « Frost » en France pour la période 1903-1923.
Artefacts, une page belge spécialisée dans la vente d’objets d’antiquité et qui propose ces boites de conserve, a expliqué qu’elles n’ont jamais été commercialisée mais qu’il s’agit des « artefacts de fiction ». « C’est un artiste qui me les fait », a expliqué le propriétaire de la page. Un artéfact est un objet fabriqué par l’homme (un outil, une œuvre d’art, un bâtiment) ou un effet accidentel qui altère une observation ou une expérience (comme un parasite dans un signal ou un reflet dans une photo).
La loi française, bien loin de tolérer l’anthropophagie
Autre preuve que ces boites n’ont jamais été conservé, la législation française de l’époque. En 1923, la France a adopté un texte de loi singulier : le décret du 26 avril 1923 relatif à la répression de l’anthropophagie dans les colonies d’Afrique équatoriale et occidentale françaises. Ce décret criminalisait toute forme d’anthropophagie dans les territoires coloniaux.
Loin de banaliser la consommation de chair humaine, l’État français cherchait donc à la réprimer sévèrement. Dans la métropole, même si le cannibalisme n’est pas nommé explicitement dans le Code pénal, il est naturellement puni à travers les infractions de meurtre, atteinte à l’intégrité du corps ou traitement inhumain. Autrement dit : il n’existait, ni sur le plan moral ni sur le plan juridique, le moindre espace pour une telle pratique, encore moins pour en faire un commerce.
En plus de ces boites de conserve, d’autres visuels similaires ont également circulé dans des campagnes satiriques ou artistiques. Certaines œuvres contemporaines utilisent des étiquettes parodiques de ce type pour dénoncer la déshumanisation ou le consumérisme extrême. La typographie, la composition graphique et la patine artificielle de la boîte indiquent clairement qu’il s’agit d’un objet recréé récemment pour donner une illusion d’ancienneté.


