Depuis quelques jours, des publications sur les réseaux sociaux annoncent des sanctions prises par le Trésor américain à l’endroit d’un réseau de 8 entreprises de raffinerie d’or dans le monde dont la majorité est basée en Ouganda. Si l’information est bien vraie, elle n’est pas récente. Les sanctions ont été annoncées depuis mars dernier.

Réchauffant cette information vieille de plus de 3 mois, la page Facebook Congo Bleu la présente comme un fait nouveau, précisant que « ces entreprises financent les groupes armés et les terroristes qui opèrent dans l’Est de la RDC ». L’information est l’objet d’un raccordement frauduleux avec la situation qui sévit dans l’Est de la RDC. Certaines pages se sont plus à relier les sanctions américaines au prétendu rôle que jouerait l’Ouganda dans la guerre qui sévit dans l’Est de la RDC.

Sur son mur, Abraham Luakabuanga a fait accompagner l’information d’un extrait du journal télévisé de la chaine B-One annonçant ces sanctions. Cela a suffi pour susciter des commentaires dans tous les sens. Certains parlant de « semblant de sanctions » et les autres se réjouissant du « bilan positif de la diplomatie ».

Plusieurs internautes ont vu en ces sanctions, la reconnaissance par les Etats-Unis de la participation de l’Ouganda dans la guerre d’agression dont est victime l’Est du pays en ce moment où les tensions ne cessent de monter entre Kinshasa et ses voisins, notamment Kigali et Kampala, accusés de soutenir le M23.

En vue d’en savoir plus, nous avons consulté le site du Trésor américain. En effet, l’Ouganda n’est sous le coup d’aucune sanction. Cependant, les sanctions contre le réseau d’entreprises impliquées dans le commerce illicite de l’or sont bien réelles. Elles ont été annoncées le 17 mars 2022. Principal frappé, Alain Goetz est « l’homme d’affaires belge qui exploite la raffinerie d’or africaine (AGR) en Ouganda, ainsi que des entreprises aux Émirats arabes unis qui reçoivent de l’or illicite des mines dans les régions de la RDC contrôlées par des groupes armés, notamment les Mai-Mai Yakutumba et Raia Mutomboki qui sont impliqués dans des activités déstabilisatrices au Sud-Kivu, en RDC ».

Avec l’homme d’affaires belge, 8 entités désignées comme « détenues ou contrôlées » par lui ont également été sanctionnées. Il s’agit d’Agor DMCC, une raffinerie d’or basée aux Émirats arabes unis, AGR International Ltd., société holding basée aux Seychelles, Alaxy, société de gestion basée en Belgique, CG – Vastgoed Invest, société holding basée en Belgique, Goetz Gold LLC (renommée PGR Gold Trading LLC), société de négoce d’or basée aux Émirats arabes unis, Premier Gold Refinery LLC, une raffinerie d’or basée aux Émirats arabes unis, Orofino, une société holding basée en Belgique ainsi que WWG Diamonds, une société holding basée en Belgique. Aucune de ces 8 sociétés n’est domiciliée en Ouganda. A travers ces sanctions, les Etats-Unis ont réduit l’influence de Goetz, accusé de soutenir des groupes rebelles.

« Le Bureau du contrôle des avoirs étrangers du Département du Trésor des États-Unis a sanctionné Alain Goetz, la raffinerie d’or africaine en Ouganda et un réseau d’entreprises impliquées dans le mouvement illicite d’or évalué à des centaines de millions de dollars par an depuis le République démocratique du Congo (RDC) », lit-on sur le communiqué annonçant ces sanctions. Pour le Trésor américain, cette action montre « la diligence raisonnable est un outil clé pour le secteur privé pour atténuer les risques liés aux régimes de sanctions américains et internationaux ». A la suite de cette action, « tous les biens et intérêts dans les biens d’Alain Goetz qui se trouvent aux États-Unis ou en possession ou sous le contrôle de personnes américaines ont été bloqués et signalés à l’OFAC ».

Nous avons également retrouvé la première trace de la vidéo d’illustration sur Internet. Elle a été postée le 21 mars sur la chaine YouTube de B-One télévision.

Ces sanctions n’ont donc aucun lien avec la résurgence du M23 survenue entre fin mai et début juin. Plusieurs personnes ont tenté de raccorder les deux informations et mettre les sanctions américaines dans le lot des « victoires de la diplomatie congolaise face à l’agression du Rwanda et de l’Ouganda ». A l’approche des joutes électorales, la manipulation de l’information est utilisée comme outil de propagande électorale. Ainsi, la vérification des faits s’impose puisqu’elle permet de sortir le vrai du faux.

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