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Saigner ou piquer les bouts des doigts ne guérit ni ne soigne pas un AVC

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Sur le réseau social Facebook et dans certains groupes WhatsApp, des rumeurs circulent prétendant montrer des astuces sur comment sauver une personne venant de succomber à un accident vasculaire cérébral (AVC). Ces méthodes sont fausses, ne vous y fiez pas.

Selon les auteurs de ces publications, il suffirait d’appliquer une méthode issue de la médecine chinoise qui serait efficace à 100%. Pour cela, il suffirait de piquer les bouts de l’ensemble des dix doigts de la victime à l’aide d’une aiguille jusqu’à ce que le sang coule. Des messages qui ont entraîné une vague de réactions sur la toile où les internautes ont spéculé dans tous les sens avec des commentaires parfois confus.

Cependant, les équipes des vérificateurs de Congo Check affirment que cette rumeur est fausse. Selon les spécialistes interrogés, il n’y a aucun avantage à  piquer les doigts  car cela n’a aucun effet sur la circulation cérébrale où se situe le problème, et cela peut même être  dangereux avec une aiguille stérilisée de manière empirique.

« AVC, voici comment sauver rapidement une personne qui vient de succomber à un accident vasculaire cérébral. Voici comment appliquer une méthode chinoise, à base d’une aiguille, pour sauver la vie d’une personne en cas d’AVC : Il serait préférable que vous ayez une aiguille de seringue à la maison, mais une simple aiguille pour la couture peut aider aussi… Tenez l’aiguille sur du feu pour la stériliser et ensuite utilisez-la pour piquer les sommets de l’ensemble des 10 doigts. Il faut attendre quelques minutes et vous verrez que la victime sera de retour à la vie. » Indique la légende de la page Facebook « Fabrice Cœur Blanc », qui a recueilli plus de 1000 likes, 332 commentaires et 19 000 partages, depuis le jour de sa publication, le 21 novembre 2024.

 Les internautes dupés et confus

Ange Abigael Lohourignon écrit : « Merci beaucoup. », Brou Willy Kader ajoute : « Merci beaucoup pour l’information et soyez bénis. » Par contre, d’autres internautes s’interrogent, Ruth Eunice Seri : « En somme, il faudrait combien d’aiguilles s’il vous plaît ? » et Oscar Gbeke complète : « Cette pratique est-elle vérifiée ? Pouvez-vous nous dire plus sur l’AVC »

Vérification des faits

 Dans notre première démarche de vérification, nous avons adressé une question à l’auteur du post pour connaitre ses sources d’informations, message auquel il n’a malheureusement pas répondu.

Une fausse rumeur

Par la suite, nous avons  contacté  Dr Fanny Malonga Kaj, professeure à la faculté de médecine de  l’université de Lubumbashi (UNILU), en  RDC. Cette dernière a réfuté ces allégations :

« En tout cas, c’est la première fois que je suis informée de cette histoire. Ce n’est pas en faisant saigner les doigts, ou les oreilles que le cerveau va être mieux vascularisé, et que le sang qui s’est collecté au niveau du cerveau va partir, ce n’est pas ça. » A-t-elle dit à Congo Check.

 Dr Elie Tshilombo, basé à Lubumbashi, partage le même avis.

 « L’AVC étant un phénomène  brusque survenant sur les vaisseaux du cerveau, lequel consiste en une interruption de la continuité de l’irrigation des parties cérébrales qui gèrent certaines fonctions vitales de l’organisme. Seul un scanner cérébral peut confirmer qu’il s’agit effectivement d’un AVC et de quel type, car la prise en charge est spécifique pour chaque type.

 Il n’y a donc aucun avantage à  piquer les doigts  car cela n’a aucun effet sur la circulation cérébrale où se situe le problème ! « Et c’est même dangereux de le faire avec une aiguille stérilisée de manière empirique. » A-t-il précisé

Ce point de vue est unanime chez les personnels soignants. Dr Costa Tshinzam basée en RDC s’inscrit également en faux contre ces affirmations.

« Il est vrai qu’en médecine, on dit ni jamais ni toujours. À mon avis, il faut faire la distinction entre un AVC constitué et les différents problèmes de santé susceptibles de conduire à la survenue d’un AVC, comme l’hypertension artérielle par exemple.  C’est pourquoi, il me semble que les gens pensent que, comme l’hypertension peut conduire à la survenue d’un AVC, le fait de se piquer les bouts des doigts pour les faire saigner aiderait à la levée d’un AVC. Pourquoi ? Peut-être croient-ils que la saignée qui fait réduire le capital sanguin, permettra de baisser les chiffres tensionnels et, par ricochet, de lever un AVC constitué. »

Il poursuit.

 « Mais, quand on connaît les mécanismes qui conduisent à l’AVC, on ne peut pas croire que le simple fait de se piquer les doigts serait la solution. D’accord, parce qu’un AVC est un accident qui survient par blocage (ischémie) et/ou par hémorragie au niveau d’un vaisseau du cerveau.

Ce qui conduit à des dégâts dus respectivement à la nécrose qui s’installe du fait de la non-perfusion (le sang n’arrive pas), à la partie du cerveau en aval de l’obstacle, soit à l’épanchement du sang dans une zone du cerveau. Ce qui permet de comprendre toute la cascade d’événements comme le coma, la paralysie d’un côté du corps, la déviation de la bouche, l’incapacité à parler… Situations que le simple fait de se piquer les doigts ne pourra résoudre. »  A-t-il conclu.

Origine de l’infox

Cette publication trompeuse attribue ses conseils à la médecine traditionnelle chinoise. Grâce à une recherche sur le moteur Google avec comme mots-clés (la méthode chinoise des dix doigts), nous avons été conduits vers un article de l’AFP publié en 2020 sur ce même sujet. Ils ont précisé que Wendy Wong, médecin et professeure assistante à l’université chinoise de Hong Kong, a expliqué  que ce message donnait une interprétation erronée des techniques d’acupuncture utilisées dans la médecine chinoise traditionnelle.

« Le système de santé chinois, pratiqué dans les hôpitaux, conjugue l’acupuncture avec la médecine occidentale pour les AVC les plus gravesElle est pratiquée sur différentes parties du corps, selon la nature de l’attaque ; il est recommandé aux personnes de solliciter immédiatement l’aide d’un médecin pratiquant la médecine occidentale » a expliqué le Dr Wong à l’AFP.

La même rédaction a interrogé en 2022 le cabinet de médecine chinoise Tuina-Loygue basé à Caen en France, qui  a indiqué que cette technique est mal expliquée dans la publication, selon ce cabinet. “Dans la pratique traditionnelle, pour une “saignée” il s’agit de sortir juste 3 à 5 gouttes de sang comme pour le test des diabétiques, ce qui n’est pas précisé ici”, indique ce cabinet de médecine chinoise.

« L’information évoquée est dangereuse si elle est diffusée auprès du grand public », soutient la spécialiste dans cet article. AEC

Un AVC, qu’est-ce que c’est ?

 L’accident vasculaire cérébral ou AVC est une pathologie qui survient de façon très brutale et qui est à l’origine de déficits moteurs (mouvement des membres), de pertes de sensibilité ou encore de troubles du langage.

Sur plus de 15 millions d’AVC qui surviennent chaque année au niveau mondial, environ 25% d’entre eux sont mortels et plus de 30% laissent des séquelles sévères avec une invalidité permanente qui rend ses victimes dépendantes, impactant directement sa famille et ses proches.

Conduite à tenir face à un cas d’AVC

Face aux symptômes d’un AVC (accident vasculaire cérébral), il est crucial d’agir VITE et d’appeler une ambulance, en composant le 15.
Appelez immédiatement les numéros d’urgence à l’aide d’un téléphone fixe ou mobile.

Il est important de veiller au confort de la personne : aidez-la à s’asseoir ou à s’allonger. Si la personne a des troubles de la conscience, mettez-la en position latérale de sécurité ; notez l’heure de survenue des premiers signes de l’AVC.

Il était important pour Congo Check de vérifier cette rumeur, car son interprétation erronée  pouvait mettre en danger la vie de plusieurs personnes.

Avis de Congo Check à la communauté en ligne de la République démocratique du Congo, de la République centrafricaine, du Congo-Brazzaville et de l'Afrique francophone : Si votre contenu est étiqueté comme faux, partiellement faux, sans contexte, photo ou vidéo retouchée... ne le supprimez pas ! Modifiez-le, avec la mise à jour de l'article de vérification que nous mettons à votre disposition, puis signalez-le-nous ! Ou faites un recours si vous estimez que notre article de vérification ne contient pas suffisamment d'éléments factuels susceptibles d'appeler à la modification de votre contenu. Notre équipe sera alors avertie et procédera au retrait du tag ou vous fournira plus d'assistance dans la compréhension du contexte autour de votre contenu ! En supprimant le contenu, nous ne pourrons malheureusement rien faire de plus et la sanction sera maintenue !

Ruth Kutemba
Ruth Kutemba
Ruth KUTEMBA, journaliste fact-checker basée à Lubumbashi en RDC et membre du Forum de Reportage sur les Crises Mondiales du Centre International pour les Journalistes (ICFJ) basé à Washington et journaliste freelance au Réseau international des journalistes (IJNet). Par ailleurs blogueuse d'Habari RDC Elle travaille dans l'audiovisuel et la presse en ligne. Écrire sur des questions féminines, démystifier les fausses informations font partie de sa passion. Elle est reporter et évolue au sein du groupe de presse Héritage en RDC et présente des journaux télévisés et radio mais aussi des émissions et est réalisatrice de documentaires.

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