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Faux, les frétins de type Kalusiya n’ont pas été introduit dans le lac Kivu par le Rwanda pour l’extinction des Sambaza de la RDC

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Une publication partagée sur Facebook avec pour intitulé “POLEMIQUE AUTOUR DES SAMBAZA CALUCIA DU RWANDA ET LIMNOTHRISSA MIODON DU CONGO” et plusieurs fois partagée sur les autres plateformes de réseaux sociaux WhatsApp, Instagram… suscite de vives réactions sur la toile Congolaise depuis ce dimanche 2 août 2020.

En effet, cette publication portant la signature de Magloire Paluku, nom du célèbre journaliste basé dans la partie orientale de la République démocratique du Congo qui stipule que les frétins de type Kalusiya ont été introduits dans le lac Kivu pour l’extinction des Sambaza de la RDC est une désinformation.

“C’est depuis 2014 que ce dossier existe et fait peur aux pêcheurs Congolais de fretins du Lac-Kivu. En effet les Sambaza bleus dits Samabaza de Kagame dont le vrai nom scientifique serait CALUCIA se nourrissent des oeufs et alevins des Sambaza LIMNOTHRISSA MIODON dont raffolent la population de Goma” écrit la publication.

*POLEMIQUE AUTOUR DES SAMBAZA CALUCIA DU RWANDA ET LIMNOTHRISSA MIODON DU CONGO* C'est depuis 2014 que ce dossier…

Posted by Jikaze Rashidus on Sunday, August 2, 2020

“Selon le chef des pêcheurs du Lac-Kivu , Sieur Shamavu, ces fretins CALUCIA ont grandi du côté rwandais où il y a de l’ombrage favorable à leur reproduction . Ils seraient exportés du Lac Tanganyika depuis 1959, amenés par un certain Alphonse Pollard. Ils se produisent difficilement à 300 petits par mois tandis que les Sambaza ordinaires se produisent à 3000 par mois par individu” poursuit la même source.

Le Kalusiya n’est pas l’espèce de Sambaza le plus exploité au Rwanda, plutôt le Limnothrissa Miodon

Dans l’objectif de tordre ces affirmations sans base scientifique, l’équipe de Congo Check a parcouru les bases de données sur l’aquaculture de fretins (appelés Sambaza en RDC et Isambaza au Rwanda) dans les cours d’eaux qui se retrouvent de part et d’autres de la frontière entre la République démocratique du Congo et le Rwanda.

Aucune de ces bases de données tant locale, nationale, régionale voire celles des organisations internationales spécialisées dans l’agriculture, l’alimentation et l’environnement n’a relevé l’existence d’une espèce de poisson dénommée Calucia. Il existe plutôt une variété de poisson appelée Kalusiya, mais celle-ci n’a pas été introduit dans le lac Kivu par le Rwanda pour l’extinction des Sambaza de la RDC.

Les recherches de Congo Check ont permis d’identifier les espèces de poissons que l’on retrouve dans les cours d’eau de la République du Rwanda. Il s’agit de Clarias; Barbus; Haplochromis; Tilapia du Nil; Sardine du Tanganyika; Synodonte; Cyprinus; Gnathonemus; Marcusenius; Limnothrissa; Varicorthinus; Mormyrus; Amphilius et Astatorechromis.

L’African Development Funds souligne dans une étude qu’une quarantaine d’espèces de poissons vivent dans les eaux rwandaises, dont quatre ont des valeur commerciale. “Ce sont les Limnothrissa miodon (appelés localement Isambaza), le Oreochromis niloticus, Clarias gariepinus et Haplochromis. Le nombre de pêcheurs est estimé à 5,500. En plus de la pêche, la plupart d’entre eux pratiquent l’agriculture et l’élevage qui leur permettre de diversifier leurs sources de revenus” écrit l’étude.

L’impact des espèces étrangères envahissantes est également un souci pour le domaine halieutique du Rwanda

Dans une recherche intitulée “Étude pour évaluer les impacts envahissant des espèces étrangères (plantes, fleurs, poissons et insectes) dans les forêts naturelles, agro-écosystèmes, lacs et écosystèmes humides au Rwanda et développement de leur plan de gestion”, le Rwanda Environment Management Authority a établi la liste des espèces de poissons envahissantes introduites intentionnellement dans le but de promouvoir la pêche dans ce pays.

Sur le point concernant l’impact économique des espèces étrangères envahissantes sur la pêche, il est noté que “la production halieutique au Rwanda est également affectée par ce système. La plupart des espèces étrangères envahissantes dans les pêcheries (telles que le Protopterus aethiopicus «Mamba», Clarias gariepinus «Kamongo ou inkube», Lampricthys tanganicanus «Rwandarushya») ont été intentionnellement introduites pour promouvoir la pêche et la production aquacole. En plus des espèces exotiques envahissantes, des espèces de poissons bénéfiques ont été introduites dont le tilapia et Limnotrissa miodon (Isambaza) qui sont parmi les espèces les plus bénéfiques et appréciées par Rwandais avec une valeur marchande élevée pour les pêcheurs” lit-on dans ce document disponible ici.

“Cependant, les espèces envahissantes se sont multipliées rapidement et empêché la croissance normale du Tilapia désiré dont la récolte réelle est de 3 à 5 kg par jour dans le lac Rweru et la même chose a été observée pour les Isambaza dans le lac Kivu. Le tableau ci-dessous compare les prix du poisson dans les lacs visités au Rwanda (lacs de l’Est, lacs du Nord et lac Kivu)” poursuit l’étude.

Une déformation de la recherche scientifique de Joseph Lushombo sur les Kalusiya ?

“En 2016 c’est un chercheur Congolais du nom de Joseph Lushombo qui a fait un séminaire de trois jours sur ces espèces de fretins et les pêcheurs Congolais ont adressé plusieurs correspondances aux autorités afin de protéger les Sambaza LIMNOTHRISSA MIODON devenus le principal aliment de base à Goma et environs” écrit le post Facebook avant de préciser qu’au bureau des marins Congolais et à la division de la pêche, ce dossier est connu mais n’est pas suivi.

“Le poisson « KAGAME » change de taille pour s’adapter au milieu !” est le titre de l’étude menée par par Joseph Lushombo de l’Université Officielle de Bukavu sur les introductions volontaires ou accidentelles d’organismes exotiques dans les habitats naturels qui sont connues depuis que les populations humaines se déplacent dans le monde entier.

Pour cette étude réalisée grâce au soutien financier de la Coopération belge au développement dans le cadre du renforcement des capacités taxonomiques (GTI) du programme CEBioS, basé à l’Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique mais également avec le soutien administratif de l’Université Officielle de Bukavu et de l’Université de Makerere, il existe au lac Kivu 5 espèces de poissons introduites. Le fretin, “Lumbu” ou “Sambaza” (côtes congolaises) ou “Isambaza” (côtes rwandaises) très apprécié par les riverains et supporte en grande partie la pêcherie du lac Kivu.

“Ce fretin est la seule espèce de poisson connue introduite volontairement dans le lac Kivu en 1959 par les pouvoirs publics en provenance de la partie nord du lac Tanganyika. Le Lumbu est souvent pêché ensemble avec le Kalusiya qui porte plusieurs noms selon le milieu. Ce poisson est appelé «Kalusiya » dans le bassin du lac Tanganyika. Il s’appelle Kagame dans la partie Ouest du bassin du lac Kivu sur les côtes congolaises. Sur les côtes rwandaises au lac Kivu, les pêcheurs l’appellent «RwandaRushya»” écrit le document, ajoutant que le poisson Kagame est uniquement connu vivre à l’état naturel au lac Tanganyika.

Ces introductions ne sont pas souvent sans conséquences sur le milieu d’introduction et les organismes y vivant. Ces conséquences peuvent se manifester par l’expression d’un comportement de compétition pour le partage de la nourriture disponible dans le lac, la consommation jusqu’à la disparition des autres organismes se trouvant dans le milieu ou par le changement de la santé du milieu. On note également des conséquences au sein même de l’organisme introduit qui est obligé de s’adapter à un nouvel habitat explique la note de l’étude consultée par Congo Check.

“Ce poisson rend les pêcheurs congolais du lac Kivu curieux jusqu’à lui donner le nom du président de la République du Rwanda car ils pensent que ce sont les services techniques du Rwanda qui l’auraient introduit au lac Kivu” renchérit Joseph Lushombo.

“Après analyse des données, nous avons constaté que ce poisson ressemble exactement aux exemplaires de cette espèce de poisson récoltés au lac Tanganyika. Ce qui veut dire qu’il est venu du lac Tanganyika. Il existe des différences de taille entre les femelles et les mâles. C’est aussi le cas pour les Kalusiya au lac Tanganyika, son milieu d’origine où les males sont plus gros que les femelles. Mais en comparant les deux groupes de Kalusiya (Tanganyika et Kivu), nous avons constaté que les Kalusiya du lac Kivu commencent à présenter des différences au niveau de la taille. Au lac Kivu, les individus de ce poisson sont plus gros par rapport à ceux pêchés au lac Tanganyika. Cette stratégie d’augmentation de la taille résulte de l’adaptation de ce poisson dans le lac Kivu qui contient une eau chimiquement différente de celle du lac Tanganyika, son milieu d’origine” détaille l’étude avant de conclure: “Notre étude montre que l’adaptation de Kalusiya au lac Kivu a obligé ce poisson à être plus gros pour survivre dans son nouvel habitat”.

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Fiston MAHAMBA
Fiston MAHAMBA
K. MAHAMBA WA BIONDI, connu sous le nom de plume "Fiston Mahamba Larousse" est diplômé en sciences de l'environnement et développement durable à l'Institut Supérieur de Développement Rural à Beni (RDC). Journaliste basé dans la partie Orientale de la République démocratique du Congo depuis 2012, il s'est forgé dans l'exercice de ce métier après plusieurs formations de journalisme à la Deutsche Welle Akademie, le centre de développement médias de la radiodiffusion publique Allemande. En 2018, il s'inscrit à l'École Supérieure de Journalisme de Lille pour parfaire une licence en journalisme multimédia. Ancien officier de communication au sein des Nations Unies, il a un Master2 en Techniques des Métiers de l'Information à l'Université Nazi Boni (Burkina Faso) en coopération avec l’Université Lumière Lyon2 (France). Il a suivi un cursus de Diplôme Universitaire en Journalisme Web Multimédia à l’Ecole Publique de Journalisme de l’Université de Tours en France avant de poursuivre sa formation en recherche à la Haute Ecole des Sciences de l’Information et de la Communication (CELSA) de la Sorbonne Université à Paris. Son livre "RDC-Ebola: Fixers, ces boucliers non immunisés" est en cours d'édition. Journaliste et chercheur spécialisé sur la région orientale de la République démocratique du Congo et les Grands-Lacs africains, ses études se focalisent sur les ressources naturelles, l’extrémisme violent, la santé, les conflits... Ses domaines de travail journalistique sont orientés vers l'environnement, le développement, l'emploi, les nouvelles technologies, l'agriculture, la politique, la culture,... qu'il couvre en écriture et images.

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