Sur le réseau social Facebook, une vidéo postée le 28 juin dernier, montre une jeune femme qui s’exprime au micro, apparemment d’un journaliste. Elle, qui est présentée comme rwandaise, exprime dans son intervention la joie qui l’anime de voir l’accord de paix signé entre la RDC et le Rwanda. Un émerveillement visible que l’auteur explique être motivé par le partage des ressources de la RDC. Or, ce court métrage de huit secondes, n’est pas réel. C’est une invention de VO3 IA, une intelligence artificielle, créatrice des vidéos.
La vidéo est estampillée « Rwandaise contente de partager les ressources de la RDC », avec en légende une insulte adressée à la jeune femme qui s’exprime dans la vidéo, qualifiée « d’idiote rwandaise », s’il faut traduire ce qui a été écrit en lingala ( 1 , 2 , 3 , 4 ).
Les publicateurs de ces vidéos qui ont préféré ne pas préciser que la vidéo est une invention de l’IA, sont parvenus à gagner plus de 2 millions de vues en seulement quelques jours.
Veo 3, l’IA prisée dans la création des vidéos
Pourtant, en l’examinant, notre travail a finir par prouver qu’elle n’est pas réelle, et que c’est juste un produit d’une intelligence artificielle. Comment l’avions-nous su ? Déjà, presque tous les outils de détection de l’intelligence artificielle auxquels nous avons fait recours ne nous ont donné que de résultats trop peu satisfaisants. C’est alors que nous avons examiné le son ou l’audio que la vidéo produit et nous avons remarqué que l’intonation vocale était plate, exagérée, et mal synchronisée avec le contexte émotionnel souhaite présenté la vidéo.
Ensuite, il y a eu l’analyse de cette vidéo. Hive Modération, Deepware Result, Lens AI, et bien d’autres n’ont pas pu apporter des détails probants. Mais, dans la vidéo des indices visuels comme l’absence de synchronisation entre les mots mimés et la bouche, le flou de l’arrière plan, nous ont amené à la conclusion que cette vidéo n’est qu’une invention de l’IA.

Plus précisément, l’IA actuellement prisée sur Facebook pour la création des vidéos, Veo 3. Elle permet de générer des vidéos presque réalistes, et certains créateurs des contenus l’utilise pour en faire des publicités.
« Il n’y a pas eu bradage des ressources », dit Thérèse Kayikwamba
Au sujet de l’accord de paix signé avec le Rwanda, la cheffe de la diplomatie congolaise, Thérèse Kayikwamba Wagner, a expliqué à la fin mois de juin dernier que « s’il y avait eu bradage, s’il s’agissait justement de vendre, comme certains le disent, nos ressources au prix de la paix, je pense que nous aurions commencé avec une séquence tout à fait différente. Nous aurions commencé justement à vendre, mais ce n’est pas ce que nous avons fait aujourd’hui ».
Selon elle, la RDC et le Rwanda ont signé un accord de paix censé mettre fin à un conflit vieux d’environ trois décennies.
Elle poursuit en affirmant que dans ce document, « il n’y a aucune provision sur les questions économiques, sur les questions des minerais stratégiques. Cet accord est très clair. Il prévoit justement la fondation pour un environnement propice dans lequel on peut aussi envisager un retour si vous voulez d’investisseurs ou on peut aussi envisager une économie plus dynamique ».
La page Facebook officielle et certifiée du ministère des affaires étrangères de la RDC partage les mêmes propos.
Le Rwanda parle d’un renforcement de la coopération économique
Du côté Rwandais, Olivier Nduhungirehe , ministre des affaires étrangères du Rwanda, a déclaré que l’accord est « fondé sur l’engagement pris de mettre fin de manière irréversible et vérifiable au soutien de l’État aux FDLR et aux milices associées».
Toujours au cours de la cérémonie de la signature de l’accord, il a précisé que toutes les parties doivent « reconnaître qu’il règne une grande incertitude dans notre région et au-delà, car de nombreux accords précédents n’ont pas été mis en œuvre et il ne fait aucun doute que la route à venir ne sera pas facile. Mais avec le soutien continu des États-Unis et d’autres partenaires, ils croient qu’un tournant a été atteint ».
Au sujet de l’aspect économique, le compte X du ministère des affaires étrangères relaient les propos du ministre Nduhungirehe : « Nous souhaitons également renforcer la coopération économique, notamment avec les entreprises et les investisseurs américains. Une croissance partagée et une coopération transfrontalière généreront des bénéfices tangibles pour nos deux pays. »
Rien d’explicite au sujet du partage des ressources naturelles entre les deux pays
Du côté du gouvernement américain, il est bien précisé que « l’accord de paix signé entre la RDC et le Rwanda ne prévoit pas explicitement le partage des ressources naturelles entre les deux pays. L’accord met l’accent sur la cessation des hostilités, le désengagement des groupes armés et la coordination sécuritaire, avec des dispositions pour la résolution des conflits et la coopération économique régionale, mais il ne mentionne pas le partage des ressources ».
Cette vidéo vues de millions de fois est une émanation de Veo 3, en plus, elle idéalise le discours de haine et la xénophobie en prêtant des explications non factuelles au sujet de l’accord de paix entre la RDC et le Rwanda, qui fait déjà couler beaucoup d’encres et de salives.