Une séquence vidéo, devenue virale sur les réseaux sociaux, à l’occurrence TikTok et Facebook, prétend montrer le premier lot des “Kuluna exécutés” dans le cadre de la mise en vigueur de la peine de mort en République démocratique du Congo. Mais après vérifications, Congo Check atteste que celle-ci est détournée de son contexte. En réalité, il s’agit d’un court-métrage montrant l’exposition des cercueils de membres de la secte mystico-religieuse Foi naturelle judaïque messianique vers les nations (FNJMN), tués lors de la répression militaire d’une marche anti-MONUSCO en ville de Goma (Nord-Kivu), fin août 2023.
Ce post Facebook, prétendant montrer le premier lot des “Kuluna exécutés” en RDC, est décontextualisé. Mis en ligne le 15 décembre 2024 sur le compte de l’internaute Gilles-Bertin Kingotolo, suivi par plus de 6.200 followers, la séquence vidéo dans laquelle on aperçoit des cercueils en couleur blanche exposés sur des brancards, est accompagnée d’une légende qui lit : “1ᵉʳ lot des kulunas qui viennent d’être exécutés en RDC”.
La même vidéo a été visionnée par plus de 2,7 millions d’utilisateurs TikTok sur le compte du nommé Jackson Malengo.
Une vidéo des victimes d’une répression militaire en 2023 à Goma
Prenant en charge la viralité de ladite vidéo, les résultats de Congo Check ont pu établir qu’elle n’a aucun lien avec le rétablissement de la peine de mort en République démocratique du Congo. Une capture d’écran de la vidéo, insérée dans le logiciel Google Lens, a permis de rétablir les faits. Ce qui nous a conduit vers ce journal-télé où l’on retrouve ce reportage de France 24 titré : “À Goma, les familles demandent justice après la répression du 30 août”.
Les victimes de cette répression militaires ont été inhumées dans la soirée du 18 septembre 2023 au cimetière Makao, situé dans le territoire de Nyiragongo, atteste le média en ligne congolais ACTU30.CD, qui reprend une image d’exposition des cercueils similaire à celle, que nous vérifions.
Jusqu’au 24 décembre, date de la rédaction de cet article, le gouvernement congolais, à travers le ministère de la Justice, n’a confirmé l’exécution des personnes passibles à la peine de mort, depuis le lancement de l’opération “Zéro Kuluna – Ndobo”, qui a déjà abouti à la condamnation à mort de 5 kulunas aux côtés de 47 autres condémnés à 20 ans de prison. Mais ces derniers n’ont pas encore été exécutés, confirme l’Agence congolaise de presse (ACP), qui cite un verdict du Tribunal militaire de garnison de la Gombe/Kinshasa. Cependant, le ministre de la Justice, Constant Mutamba, a annoncé que ces peines capitales seraient bien appliquées, sans clairement circonscrire le temps ou encore la date.
Le post, que nous vérifions, a été publié par l’internaute Gilles-Bertin Kingotolo. Nous l’avons contacté via Messenger, afin d’avoir ses sources d’information, mais il n’a pas réagi.
Contexte
Le 15 mars 2024, le gouvernement de la République démocratique du Congo a annoncé la reprise des exécutions capitales. La décision a été notifiée dans une circulaire signée mercredi 13 mars par la ministre honoraire de la Justice de la République démocratique du Congo (RDC), Rose Mutombo. Selon le document, les “actes de traîtrise ou d’espionnage ont fait payer un lourd tribut tant à la population qu’à la République au regard de l’immensité des préjudices subis”.
D’après Radio France Internationale (RFI), qui cite le ministère de l’Intérieur, au moins 800 arrestations des membres des gangs ont déjà été enregistrées durant l’opération “Zéro Kuluna”.
En RDC, la dernière exécution remonte à 2003, date à laquelle le gouvernement congolais a imposé un moratoire sur les condamnations à mort. Mais une note circulaire du ministère de la Justice datée du 13 mars a levé ce moratoire « en vue de débarrasser l’armée [congolaise] des traîtres […] et d’endiguer la recrudescence d’actes de terrorisme et de banditisme urbain entraînant mort d’homme ».
Congo Check a examiné un post prétendant montrer le premier lot des “Kuluna exécutés” en RDC et l’a trouvé hors contexte. Puisqu’en réalité, il s’agit d’une séquence vidéo de l’exposition des corps des victimes d’une répression militaire, tuées dans une marche anti-MONUSCO, fin d’aout 2023, dans la ville de Goma.