En Centrafrique la publication selon laquelle Martin Ziguélé, président du parti politique Mouvement de Libération du Peuple Centrafricain (MLPC) s’est moqué des tombes de ses amis en laissant de l’argent, est une fausse interprétation. Méfiez-vous !
La publication est très vite devenue virale sur le réseau social Facebook depuis le 08 octobre, alimentée pour la première fois par Theophane Ngbaba dans le groupe de partage d’information République Centre Africaine puis a été relayée par d’autres internautes sur différents sites d’information en ligne.
Cette publication soutient que : « Je ne suis pas politicien donc j’analyse juste les faits : n’est-ce pas là se moquer de quelqu’un ? Par respect on dépose les bouquets de fleurs sur les tombeaux de nos regrettés défunts, on ne farote pas avec quelques billets de 1000FCFA….c’est insultant Mr L’honorable ».
Une tradition locale (spécialistes)
Dans le cadre de la vérification des faits l’équipe du Congo Check en Centrafrique a pu rencontrer les chercheurs pour éclairer l’opinion publique à cette problématique.
Le docteur Kevin Kossi, sociologue et professeur au département de la sociologie à l’Université de Bangui, trouve que c’est une relation traditionnelle avec les morts.
« La mort n’est pas en effet un départ définitif selon la culture africaine. Par conséquent il faut des rituels. Chez nous en Afrique lorsque les parents organisent des rituels c’est pour entretenir les relations qui existent entre eux et les morts. Alors je peux dire qu’il y a deux situations qui se dégagent de cet acte, le fait de bénir ces tombes et distribuer de l’argent, soit c’est pour permettre à ces défunts de continuer à vivre parce que les morts ne sont pas morts. Soit pour solliciter leurs forces parce qu’ils nous influencent » explique le sociologue.
« Si on n’a des difficultés comme : problème d’emploi, bâtir au pouvoir, d’avoir de poste ou bien de gagner une situation donnée, on peut toutefois ouvrir des sacrifices à ses grands parent, cela peut être le morceau de viandes, le poulet ou de l’argent afin de solliciter leurs appuis mystiques de pouvoir nous guider dans tout ce que nous voulons faire ici-bas. Donc l’acte de Ziguélé est correct selon la coutume africaine, ce n’est pas le fait de se moquer de respect » poursuit-il.
Une visibilité politique en prélude des élections
Sur le plan communicationnel l’équipe de Congo Check en RCA s’est rapprochée du professeur Jules Yanganda, expert en communication et enseignant au département des Sciences de l’Information et de la Communication à l’université de Bangui, voit dans l’acte de Ziguélé sur ces tombes un geste de marketing politique.
« Il s’agit d’un marketing politique surtout cela se situe en période électorale. Ziguélé veut démontrer à travers ce geste qu’il reste fils du terroir, quelqu’un qui garde et respecte la tradition. Donc ce geste signifie qu’il est un candidat proche du peuple, à qui le peuple doit faire confiance pour contribuer au développement » affirme-t-il.
Pour Martin Ziguélé, le culte aux morts est présent dans la tradition voire dans la religion
Dans une interview exclusive accordée à Congo Check par Martin Ziguélé, ce dernier dément toutes ces affirmations.
« Je pense que c’est une interprétation fallacieuse. Dans la région où je suis né précisément à Paoua lorsque vous allez vous incliner devant une tombe d’un parent ou un ami, vous allez avec les neveux du défunt et lorsque vous deposez de l’argent sur la tombe, ce sont les neveux du défunt qui prennent cet argent. Ce qui m’a vraiment surpris est la réaction des uns et autres. Je ne sais pas, quelle interprétation les gens ont voulu donner à cela, moi je suis chrétien bien avant ceux qui parlent sur les réseaux sociaux. Lorsqu’on prie saint Vincent de Paul ou on implore la sainte vierge Marie, est-ce que c’est du charlatanisme ? Soyons sérieux».
Dans la même lignée ce dernier poursuit : « j’ai 63 ans. Quel intérêt aurai-je à me moquer de quelqu’un qui est déjà mort ? Le geste que j’ai fait ce n’est pas pour me moquer de qui ce soit croyez-moi. Ce sont mes camarades, j’ai ce droit d’honorer leurs mémoires » a-t-il conclu.
A l’horizon des échéances électorales en République Centrafricaine, plusieurs campagnes de désinformation fleurissent sur les réseaux sociaux visant des potentiels candidats, dans l’optique de manipuler l’opinion publique.