Le jeudi 26 septembre, plusieurs sources ont signalé des échanges de tirs à Rusayo dans le territoire de Nyiragongo et dans d’une partie de Mugunga ( Goma ). Ces échanges de tirs ont créé de la panique et des spéculations au sein de la population, sur notamment l’identité de ceux qui se battent. Certains ont même avancé une thèse d’une attaque des rebelles du mouvement du 23 mars (M23) contre les positions des forces armées de la République Démocratique du Congo (FARDC). C’est le cas de l’internaute Gracien Béton Yuma qui a publié sur Facebook, que le M23 voulait « déborder vers Bulengo et Rusayo ».
Méfiez-vous, Congo Check a enquêté sur cet incident, et les résultats prouvent que le M23 n’est pas concerné dans ce qui s’est passé. Il s’agissait plutôt des FARDC qui échangeaient des tirs avec les jeunes patriotes Wazalendo du groupe APCLS, poste contrôlé par ces derniers, se trouvant à quelques mètres du camp des déplacés de Lushagala extension.
Certains internautes ont cru à cette information. Cas de Fils Pedro Pedro Ndonga qui écrit « Merci, courage à vous. Dieu est au contrôle ». Ntumba Nkuenyi renchérit « Qu’il pleuve ou qu’il neige, nous allons la gagner cette guerre injuste ».
D’autres par contre n’y croient pas. « Arrêtez de raconter n’importe quoi, c’était juste une altercation entre FARDC et certains wazalendo (les fdlr y compris), sur certaines positions. Mais la situation est redevenue normale. Les M23 n’ont pas la capacité même de tenter de déborder à Rusayu, encore moins à Bulengo, ils sont très loin de là », réplique l’internaute Grâce Kalwahali Cost.
Nous avons tenté de contacter l’auteur de cette publication via Messenger, mais ce dernier n’a pas donné suite à notre message.
Plusieurs témoignages qui écartent le M23
Congo Check a alors entamé le processus de vérification de cette information. Nos recherches nous ont permis d’entrer en possession d’éléments prouvant que le M23 n’est pas impliqué dans cet incident survenu à Rusayo et Mugunga jeudi dernier. Le groupe des Wazalendo APCLS a confirmé que c’est leur position qui a été attaquée et du côté du gouvernement, les FARDC ont confirmé que cet accrochage avec les Wazalendo. Le M23 n’intervient nulle part, contrairement à ce qui est publié sur la page de cet internaute.
Le premier à intervenir était l’APCLS. Dans une vidéo partagée sur les réseaux sociaux, on voit le responsable de l’unité Wazalendo attaquée par les FARDC se plaindre et demander des comptes. La vidéo a fait le tour des réseaux sociaux et a été partagée par les journalistes. Ici le colonel Bishashe de l’APCLS.
Certains médias internationaux ont parlé de cet incident du jeudi 26 septembre. C’est le cas de cet article publié sur le site du journal Le Monde. « Le Jeudi, des unités de l’armée congolaise ont tenté une opération contre des FDLR dans le site de déplacés de Lushagala, situé en périphérie de Goma, chef-lieu du Nord-Kivu. Mais les militaires congolais ont finalement attaqué par erreur une position tenue par des miliciens de l’Alliance des patriotes pour un Congo libre et souverain (APCLS), un autre groupe armé pro-Kinshasa, selon des sources sécuritaires et internationales » peut-on y lire
Un peu plus tard, ce groupe d’autodéfense va sortir un communiqué signé par leur chef, le lieutenant général autoproclamé Buingo Karairi Janvier, condamnant cette attaque qui a fait des morts et blessés dans leurs rangs. Communiqué authentifié par le porte-parole de l’APCLS contacté par Congo Check. Il nous a même partager la version originale de ce communiqué.
De leur part, les FARDC ont organisé ce vendredi à Goma, une réunion de crise avec les responsables des groupes Wazalendo, dans l’objectif de dissiper le malentendu et redorer la confiance entre partenaires. Après cette réunion, le lieutenant-colonel Guillaume Ndjike Kaiko, porte-parole de l’armée au Nord-Kivu, a reconnu cet accrochage, indiquant qu’il s’agit d’un incident qu’il faut oublier. « Le commandant des opérations au Nord-Kivu et Sud-Kivu, le lieutenant général Farsi Kabwe a tenu à mettre autour d’une même table les Wazalendo et les responsables des FARDC, il était question de lever l’équivoque par rapport aux incidents qui sont arrivés. L’autorité a expliqué aux Wazalendo de quoi il s’agissait, il s’agit d’un incident… Il était très important d’oublier déjà ces incidents, et de regarder dans la même direction. », a-t-il déclaré. Congo Check détient l’intégration de cet audio, obtenu du journaliste Paulin Aganze de Goma et authentifié par le lieutenant-colonel Guillaume Ndjike, contacté par Congo Check la nuit du 27 septembre.
Comme l’incident s’est passé à quelques mètres du camp de Lushagala, Congo Check a également parlé avec le président de ce camp. Ce dernier a confirmé cet incident entre les FARDC et les Wazalendo. « Oui, il y a échangé des tirs en armes lourdes et légères. » « Les Wazalendo qui étaient sur leur position pas trop loin de notre site ont été délogés, ils se sont repliés du côté des camps de Kashaka… », a-t-il répondu à Congo Check.
À la question de savoir si les éléments du M23 étaient parmi ceux qui échangeaient des tirs, Muhima Amani Binwa dément. « Vraiment, il n’y a pas d’échos M23 dans ce dossier. Dans toutes les informations que nous avons récoltées depuis hier matin, le M23 n’y figure pas. Nous sommes même arrivés sur cette position à laquelle étaient délogés les Wazalendo, réellement, le M23 n’est pas dedans », a-t-il répondu à Congo Check.
Cette information qui souligne que le M23 voulait déborder vers Bulengo et Rusayo le jeudi 26 septembre dernier est donc fausse. Les échanges des tirs entendus dans ces coins se trouvant dans le territoire de Nyiragongo et à Mugunga (Goma), étaient l’œuvre des forces armées de la République Démocratique du Congo et des jeunes résistants Wazalendo.